mardi 29 juin 2010
dimanche 27 juin 2010
Nous avons mis au point un système, dit le faux dieu, qui nous permettra, quelle que soit la situation qui se présentera à nous ici-bas, d'avoir toujours raison, et qui nous fera de telle sorte toujours sortir vainqueur de n'importe quel combat, puisque ce qui compte, en ce monde, n'est pas la force, la justesse ou encore la profondeur d'une idée, mais bien la force de persuasion qui permet d'imposer une idée, quelle qu'elle soit...
Sommes-nous tous des double cons ?
Nous sommes tous, que nous le voulions ou non, des consommateurs conditionnés...
samedi 26 juin 2010
Le rapport Charlemagne
Nous, Gilbert Delcopette de la Salle d'attente, sous-sergent-chef de la brigade des services secrets pas si secrets que ça, puisque bon, tout le monde au village sait ce que je fais, et que, quand j'ai bu, j'aime bien me vanter d'être membre des services secrets pas si secrets que ça, vous adressons ce rapport, notre Seigneurie, sur un dénommé Charles Magne, âgé à notre connaissance de seize ans, fils des infortunés Pépin et Bertrade Magne.
Ce jeune homme, en effet, présente de graves troubles du comportement depuis de nombreuses années, ce qui en soi n'est pas bien original, à la différence que ceux-ci semblent contagieux, ce qui fait de ce jeune homme un agitateur politique potentiel à surveiller.
Voici les faits : depuis l'âge de six ans, le susnommé Magne, Charles de son prénom, préfère, à la différence des enfants normaux, s'asseoir sur une petite chaise de bois, avec une petite table devant lui, et tracer d'étranges signes, accompagnés ponctuellement de petits dessins, sur une tablette noire, au lieu de courir dans les champs pour jouer avec les cochons ou se rouler dans la boue avec ses petits camarades de jeu.
Depuis quatre ans, Charles, qui avait donc douze ans, a réussi à entraîner de nombreux enfants plus jeunes que lui dans son délire, à la grande consternation de leurs parents. Depuis trois mois, il a même apporté d'on ne sait où une tablette noire de plus grande taille, qu'il appelle, et je le cite, "grand tableau noir", sur laquelle il écrit des signes étranges eux aussi, vous l'aurez compris, notre Seigneurie, que les autres bambins semblent prendre un malin plaisir à recopier frénétiquement sur leur plaquette personnelle.
Pire, ces pratiques ont l'air de se répandre comme une traînée de poudre, puisque différents foyers de cette infection ont été recensés jusque sur les hauteurs de La Préalle et Cheratte, qui se trouvent tout de même à près de cinq kilomètres de notre bon bourg de Herstal, soit à mi-chemin entre celui-ci et le bout du monde connu, là où règnent en maître les démons qui gardent les clefs de l'Enfer, et qui nous transformeraient en statue de sel si nous ne portions sur notre front la croix, symbole de notre Seigneurie, tracée à la chaux vive.
Il est plus que probable que le jeune Charles soit possédé par ces mêmes diables, qui, nous le savons depuis longtemps aux services secrets pas si secrets que ça grâce à nos agents qui, au péril de leur vie, sont parvenus à s'infiltrer parmi eux, préparent une vaste offensive contre notre monde. Le jeune Charles, sous leur influence, leur ouvre sans nul doute la voie en endoctrinant notre belle jeunesse...
Nous vous préconisons donc, notre Seigneurie, de soumettre Magne à la question et à le mettre sur le bûcher. S'il survit, c'est qu'il est coupable, et nous le condamnerons à une lourde peine de travail forcé qui remettra son esprit sur le droit chemin. S'il ne survit pas, il sera déclaré innocent, et nous le dédommagerons avec générosité, comme à l'accoutumée...
Ceci clôt donc le rapport que nous vous adressons, notre Seigneurie.
Bien à vous,
Gilbert Delcopette de la Salle d'attente
Publié dans le n° 40 des "Chemins de Traverse" (juin 2012)
vendredi 25 juin 2010
Misérable
Misérable
Sa vie fut bien étrange...
Éclairé par un ange,
Il espérait chaque jour
Et la lumière, et pour toujours...
Son âme errant dans l'autan
Te contemplait à travers vents :
Il était seul, il était perdu,
Les yeux d'amour éperdus.
Chercheur plein d'espoir,
Condamné parmi ses semblables,
Futile marchand d'ineffable
À l'aube de t'entr'apercevoir,
Celui qui marchait avec les esprits
S'enfonça à jamais dans l'oubli,
Raillé par l'univers qui l'entourait,
Poignardé d'avance par le monde qu'il choisirait...
(1998)
L'idéation en tant qu'ultime manifestation de la vie ?
Quoi de plus insaisissable qu'une idée, que le cheminement de celle-ci en un esprit ?
Un homme, une nation peuvent facilement être neutralisés par des entités qui lui sont hostiles...
Mais une idée, qui peut la saisir, qui peut la cerner ?
Hommes et nations ne sont pas éternels, tandis qu'une idée, une pensée, aussi insignifiante soit-elle en apparence, pourra poursuivre sa route, traversant les siècles, interprétée dans un sens aujourd'hui et ici, puis dans son contraire le lendemain à l'autre bout du monde, par des hommes ou des nations tout aussi semblables.
Mais quelle est l'origine de l'idée ? Comment l'arrêter, la contrer, si une entité physique déterminée ou quelconque ne peut lui être associée ? L'idée, la pensée en elle-même, constitue-t-elle une menace ? Et pour qui, ou quoi ?
Est-ce l'homme, la nation, ou les interactions de l'un par rapport à l'autre qui déterminent son apparition dans l'inconscient collectif d'un peuple ?
Est-ce ce même inconscient collectif qui s'exprime par son incarnation en l'esprit d'un individu, ou par la voix désincarnée d'une nation ?
L'idée est-elle à l'origine de la vie, ou la vie à l'origine de l'idée ? Sont-elles liées l'une à l'autre, sont-elles simplement des accidents ? Ou des essais de puissances qui nous dépassent ?
jeudi 24 juin 2010
Le simple fait d'écrire, ou de vouloir écrire, est un acte déraisonnable en lui-même...
C'est certainement pour cela que certains disent que le rêve et le but ultime de tout écrivain devrait être d'un jour ne plus écrire, pour aider efficacement son âme sur le chemin de la guérison, et trouver ainsi enfin la paix...
Mais, malgré cela, et quoi qu'il en soit, frères et sœurs, poètes et écrivains de tout style, de toute nation, osons assumer notre folie, sans doute est-ce là le seul et vrai secret de la guérison !
Le vaccin
Un jour, un jeune homme plein d'enthousiasme, dont j'ai oublié le nom, vint me trouver...
Au comble de l'exaltation, il me dit : "Maître, j'ai enfin trouvé, oui, j'ai enfin trouvé la solution, le vaccin contre la connerie humaine, ce que nous cherchons depuis si longtemps !"
Il m'exposa son idée, et, plein de ce même enthousiasme, qui allait s'avérer contagieux, nous décidâmes de la communiquer au monde.
Elle était si simple que nous nous demandâmes, à l'Assemblée générale des Nations unies, comment nous n'y avions pas pensé plus tôt...
Elle comportait deux phases...
Première phase : Déclencher un conflit nucléaire généralisé
Seconde phase : Terminer le travail à la machette ou à la guillotine
... et elle fut approuvée à l'unanimité générale, sous les applaudissements et les hourras de nombreux représentants de nombreux pays, qui ne s'imaginaient sans doute pas faire partie du lot...
Et oui, mon fils, c'est ainsi, et à ce prix seulement, que tu peux aujourd'hui vivre en paix...
lundi 21 juin 2010
ÉTHER
ÉTHER
Nous voici à l'heure de l'inventaire,
L'heure de plonger tel un serpentaire,
L'instant où la brume vous envahit,
Le temps d'abandonner les idées noires de sa vie.
Rien de plus simple que de chasser ce cafard,
Il me suffit de penser à ma mie,
Celle qui m'accompagnera durant mes vies,
Celle qui me sortira de ce brouillard.
Souvenez-vous que rien n'est immuable
Et votre existence n'en sera que plus belle
Car possédant cette foi irréelle
Votre univers s'emplira de fables !!!
Si vous saviez garder l'esprit poète,
Votre âme n'en serait qu'à la fête ;
Vous marcheriez droit malgré la tempête,
Si vous saviez gagner l'éther du poète...
(1998)
ROI
ROI
À la fois roi des fous,
Et tellement fou de toi
Que je me suis brisé le cou.
J'étais fou, et me voici roi,
Roi d'un empire déchu
D'où je règne sans émoi,
Sans avoir rien aperçu.
Du haut de cet empire,
Tout là-haut dans ma tour,
Je n'entends que tes soupirs
Et m'enfuis sans détours.
J'étais fort, j'étais riche,
Je ne vivais que de rires et de joies...
Mais dans mon cœur en friche
Étais-je le fou, étais-je le roi ?
En mon for cette éternelle question
Fit battre mon cœur d'inanition,
Inanition de rester sans réponse,
Enchevêtré dans des millions de ronces.
Mais maintenant que je sais
Que ne suis ni fou ni roi,
Que tout simplement je suis moi,
Oui, maintenant que je sais...
(1998)
DÉSENCHANTÉ
DÉSENCHANTÉ
Que d'amours éphémères,
Que de mortels suaires,
Que bien peu de consistance
Dans cette piètre existence.
Un nouvel amour vient de s'envoler
Et pourtant n'en garde que peu de traces.
Tel est donc le destin de ma race,
Que de vivre seul dans la piété.
Mon cœur suit toujours le sien
Sous l'anxieux regard des saints.
Je sais que je l'aime encore,
Mais pourquoi toujours être fort ?
Je me retrouve de nouveau seul,
Seul au sein de mon linceul ;
Cette lueur qui brillait en mon ciel
Est une nouvelle fois devenue fiel.
Hommage à toi, mon Amour,
Car en mon cœur, pour toujours
Et à jamais, resterai envahi
Par l'image de ton âme ravie !
(1998 - publié dans le n°37 des "Chemins de Traverse")
vendredi 18 juin 2010
Les rennes n'ont pas froid aux oreilles
J'ai toujours aimé les rennes.
Enfant, on m'a dit que le traîneau du Père Noël était tiré par sept de ces charmants animaux, mais je pensais qu'il s'agissait des sept femmes du roi de Norvège, Sigurd Illigson...
Durant mon adolescence, mon père m'enseigna tout ce qu'il fallait savoir sur leur élevage, sur l'utilisation des différentes parties de leur corps, que ce soit pour se vêtir ou pour fabriquer des hameçons à partir de leurs os...
Aujourd'hui, voilà plus de trente ans qu'à chaque hiver je dois monter un peu plus vers le Nord pour trouver le lichen dont ils se nourrissent, et tout le monde pense que je suis fou de continuer à vivre comme les pères de nos pères qui, depuis la nuit des temps, accomplissent les mêmes gestes que moi, au lieu d'être bien au chaud dans ces nouvelles constructions qui ne sont même plus en bois et de regarder cette boîte à images qu'ils appellent télévision et qui endort leur esprit, tout en buvant de l'alcool frelaté qui détruit leur santé et condamne leurs âmes à des tourments bien pires encore.
Ce n'est qu'en leur compagnie que je me sens heureux, et même ma femme et mes trois fils ne me donnent pas tant de joie...
Longtemps, je me suis couché tard
La journée débutait pour moi tous les jours vers onze heures.
C'est à cette heure-là qu'en général j'ouvrais les yeux, mais parfois bien plus tard...
Je ne sortais de mon lit que vers treize heures, et prenais mon petit-déjeuner une demi-heure plus tard.
Après cela, je me reposais un peu, en attendant le repas de midi, enfin je veux dire le repas de seize heures...
Après une bonne sieste, je ne devais me relever que vers dix-neuf heures pour prendre un bon bain, mais pas trop longtemps, pour ne pas manquer le souper de vingt-trois heures.
La journée pouvait enfin vraiment commencer, et j'étais heureux de pouvoir me coucher vers minuit pour goûter à un repos bien mérité...
lundi 14 juin 2010
OUT OF PARADISE
OUT OF PARADISE
dans un jardin
luxuriant.
Une pomme,
même pas sucrée,
un peu aigre,
nous en a chassés...
Depuis, Ève m'a quitté pour refaire sa vie avec un chanteur espagnol, et tous les matins je suis obligé de me lever à cinq heures pour aller travailler à l'usine, dans les faubourgs de la ville triste et glauque dans laquelle je vis...
Ma vie n'est plus que douleur, et lorsque je songe au jardin de mon bonheur, au jardin de mon enfance, des regrets et une angoisse terrible m'assaillent...
Quelle joie était la mienne lorsque je pouvais serrer Ève tout contre moi, lorsque nous pouvions nous baigner dans l'eau de la source de la vie éternelle...
Je sais que je ne retrouverai jamais ce que j'ai perdu ; Ève le sait aussi, où qu'elle soit...
Nous n'avions qu'un seul interdit : le fruit de l'Arbre de la Connaissance. Nous y avons goûté, mais l'enfer que nous vivons, l'avons-nous vraiment mérité ?
Dieu nous a expulsés du Paradis qu'il avait pour nous construit, nous qui sommes tout de même ses enfants... Une telle dureté de la part d'un père se justifie-t-elle ? Nous avons péché par gourmandise, par défi, par curiosité, comme tous les enfants le font un jour ou l'autre...
jeudi 10 juin 2010
mardi 8 juin 2010
mercredi 2 juin 2010
Le grand Wu
Je me promenais seul dans la forêt.
Les oiseaux chantaient, le soleil brillait...
Bref, c'était une belle journée estivale, une des premières de l'année.
Je ne m'en aperçus pas tout de suite, mais petit à petit un silence de plomb s'était fait tout autour de moi.
Ce fut le craquement d'une brindille derrière moi qui me fit prendre conscience du danger...
On m'en avait tant parlé depuis ma plus tendre enfance, mais je n'y avais jamais vraiment cru, je pensais que ce n'était qu'une invention des vieillards du village pour faire passer le temps, lorsque celui-ci s'attarde un peu trop au coin de l'âtre de nos chaumières...
Heureusement, je pus prendre la fuite en courant droit devant moi, sans me retourner : c'est d'ailleurs la seule chose à faire si on veut lui survivre !
Oui, mes enfants, c'est ainsi que j'ai survécu au grand Wu...
(Publié dans le n°37 des "Chemins de Traverse")
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