"Tous vous tendent leurs
pièges, savants, politiciens, banquiers ; les pièges où eux-mêmes sont pris. Le
poète vous tend sa bouée, et s'il le peut, sa main."
Armel Guerne
***
INTRODUCTION
Tu ne sauras jamais mon nom
De tous les démons je suis bien le plus habile
Siècle après siècle j'ai tissé ma
fine toile
Au cœur des campagnes et des plus
grandes villes
Je vais vers ceux qui se perdent
sous les étoiles
Mon boulot c'est chasseur d'âmes
Nuit après nuit
J'arpente les rues des cités
endormies
À la recherche de sang jeune et
bouillonnant
Des désirs les plus fous En les
satisfaisant
Je gagne mon pain et un peu
d'éternité
Pour eux par contre c'est la
chute sans pitié
Dans la géhenne Je ne comprends
pas à qui
Ni à quoi peut servir toute cette
énergie
Que je passe tout mon temps libre
à collecter
Ce que je capture n'est que
médiocrité
AHASVÉRUS
Ô toi le Juif errant qui marqué d'une croix
De feu et de sang au milieu de
ton front
Pour avoir commis le bien pire
des affronts
Il te faut aujourd'hui et à
jamais sans choix
Possible traîner à ta suite le
charroi
De ton péché Pourtant c'est avec
affection
Que je t'observe de loin me
disant qu'au fond
Ton sort est injuste Quelle est
donc cette loi
Qui a fait de toi ce que tu es
maintenant
Un être qui ne peut pas mourir et
ayant
Perdu tout espoir de vivre ne
pouvant même
Pas plus d'un jour dans la même
couche un instant
Te reposer Tu es devenu pour les
gens
De la populace un symbole
d'anathème
LES ÂMES PERDUES
Errant dans le triste monde sans but aucun
Les âmes perdues m'inspirent à la
fois
De la pitié et du dégoût Comme
moi
Qui m'agite sans nul répit pour
un parfum
Oublié retrouver elles sont
presque à jeun
Toute la journée et leur sommeil
est si froid
Qu'aucun rêve jamais ne vient
troubler la voix
Criarde lézardant leur mémoire
comme un
Sabre tranche un cheveu Pour
elles nul repos
Où qu'elles aillent c'est comme
si de leur peau
On les privait comme si leurs os
on broyait
Elles ne trouveront jamais la
paix et l'eau
Du Léthé l'oubli de son noir et
blanc manteau
Ne peut leur apporter ou cacher
leurs méfaits
L'amour est mort entre nous
L'amour est mort entre nous Oui c'est bien fini
Mon cœur ne palpite plus quand je
pense à toi
C'est plutôt la haine qui
s'empare de moi
Lorsque ton image mon esprit
envahit
Au sein des rues de la ville je
ne veux
Plus te croiser Je pense ainsi à
d'autres jeux
À toutes ces filles qui te
remplaceront
D'ici quelques heures quelques
jours ou saisons
Que Dieu pardonne ta folie mais
sauter
A juste fait de toi une âme
condamnée
À une longue errance et la
libération
Que tu obtiendras après moult
libations
N'est pas pour demain Il te
faudra m'oublier
Tout en arrivant à ne pas me
détester
ANAMALEK
Ils sont comptés tes jours ô grande Babylone
Percés ont été tes murs par
Anamalek
Pour que des démons le flot
puissant tes obsèques
Vienne célébrer Les journées
monotones
Et rieuses au sein de tes rues
friponnes
Laisseront la place au
délabrement au sec
Tourment des âmes Des corps
mutilés avec
Délectation seront offerts à la Gorgone
Tandis que les femmes seront pour
les satyres
Parfumés d'ignobles senteurs Anéantir
La civilisation voilà ma mission
Et personne ne m'en empêchera Agir
Piétiner les cœurs et avant tout
détruire
Derrière moi il n'y a que
désolation
L'ANTÉCHRIST
Oh oui il est venu le terrible Antéchrist
Il y a bien
longtemps de cela déjà Sa
Face immonde est
restée gravée au fond de ma
Mémoire Mais de nos
jours et cela m'attriste
Plus que tout il est
si puissant qu'un talmudiste
Averti pourrait bien
voir en lui un prélat
Honorable Certains
seraient même prêts à
Faire de lui un roi
descendant du psalmiste
Ils paieraient assez
tôt leur méprise certes
De leur misérable
vie mais je le regrette
Amèrement nul ne
pourrait le reconnaître
Et le forcer à se confier
aux expertes
Mains du sanhédrin
sans que la moindre pauvrette
Ne se mette à gémir
en implorant cet être
L'ANTISÉMITE
À la simple vue de l'étoile de David
Son estomac et ses intestins se
convulsent
Son rêve est que de leurs terres
on les expulse
Et de voir la Shoah faire à
nouveau le vide
Autour d'elle tout en punissant
cet avide
Peuple pour ses nombreux méfaits
C'est qu'il compulse
Nuit et jour des Bibles et ses
yeux se révulsent
Quand il en découvre de nouveaux
plus sordides
Encor que ceux dont il avait eu
vent durant
Son endoctrinement Il les déteste
sans
Avoir jamais eu l'heur de les
rencontrer ou
De s'informer sur leur culture il
croit leur sang
Impur ou différent du sien et
classe au rang
Des sottises ceux qui assurent
qu'il est fou
ANUBIS
Le dieu à tête de chacal posa les yeux
Sur moi et me fit don d'une clé précieuse
Que m'envie même le Diable Poussiéreuse
Et évanescente elle entrouvre dans le feu
Les portes des mondes me permettant au mieux
De passer à l'envi de l'un à l'autre Pieuse
Recluse au fond d'un cloître ou catin envieuse
D'un quelconque harem je te conquiers joyeux
Sans même que tu le saches Je sors ainsi
Vainqueur des combats les plus rudes Étourdis
Mes ennemis ne sont que pantins ballottés
Par les portes du temps Mon esprit adouci
Par ces victoires trop faciles en oublie
Presque la haute lutte et le sang pur versé
L'ASSASSIN
Du sang coule sur ses doigts mais il garde son
Sang-froid De manière méthodique
il efface
Tout ce qui pourrait le trahir la
moindre trace
De son passage tout en s'essuyant
le front
Les mains Il essaie de sourire
devant son
Reflet aucun des traits renvoyés
par la glace
Ne semble révéler que la triste
carcasse
Qui dort paisiblement dans son
ancien salon
Est une victime de plus à son
actif
Pendant quelques instants il
demeure pensif
S'il continue de la sorte il
restera
Impuni inconnu Il est
contemplatif
Face à son œuvre et un souffle
peu sédatif
Lui suggère que la gloire le
boudera
L'ATTENTE
Avec un crucifix caché sous son grand lit
Et quelques gousses d'ail pendues
au plafond
Elle craint de tomber dans un
sommeil profond
De peur qu'un vampire ne morde
son joli
Cou Voilà plus de quinze ans
qu'elle attend Kali
Ou du moins une de ses
incarnations
Tout à coup un soupir se fait
entendre au fond
Du jardin Une ombre rôde et c'est
sous les plis
De ses draps qu'elle enfouit son
visage atterré
Quelque chose vient de la vitre
cogner
C'en est un elle en est sûre Elle
se saisit
De sa croix de bois et vers la
nuit mordorée
S'avance bravement Pas de crocs
acérés
Derrière les rideaux juste un
oiseau transi
Au fond d'une bouteille
J'ai laissé mon âme au fond d'une bouteille un
Soir de juin j'ai vidé
désespérément celles
Qui se mettaient sur ma route
ayant goût de sel
Avec l'espoir de l'y retrouver
Même à jeun
Mon corps me réclame toujours
plus de parfums
Vaporeux et mes mains tremblent
quand il ruisselle
Au long de mes tempes au creux de
mes aisselles
Le désir cruel et tyrannique
commun
À tous ceux qui ont eu le malheur
d'un jour boire
Au calice de la bêtise Ma mémoire
N'est plus aujourd'hui qu'un
champ de bataille sur
Lequel quelques ombres se
disputent la gloire
De m'entraîner encor plus bas
dans de plus noires
Vallées auxquelles m'enchaînent
mes blessures
BLIND JUSTICE
Du sang perle au coin de ses lèvres vermillon
Un sourire
s'esquisse avant de fondre en un
Grand éclat de rire
dément et très commun
À ceux qui se savent
intouchables Prions
Pour lui afin que
ses mains à la roue d'Ixion
Ne soient enchaînées
par les injonctions d'un
Quelconque dieu qui
devrait comme chacun
L'espère justice
toujours rendre Fiction
Cela est comme nous
le savons tous Il n'est
De lande terrestre
ou céleste où un sonnet
Aurait plus de
valeur que quelques lignes dans
Les faits divers
Mais bon quand tout cela on sait
On continue son
ouvrage et d'avancer
Vers ce que nous
pensons être un des yeux du temps
CERBÈRE
Les trois têtes du grand chien qui garde l'entrée
Des Enfers sont comme des écueils
acérés
Qui déchirent la mer et les fiers
voiliers
Pourtant elles furent charmées
par Énée
Ainsi que par Orphée qui surent
exploiter
Leurs faiblesses à vous d'en
faire autant Priez
Pour votre salut vous tous qui
aimeriez
Tant du monde d'en bas rapporter
une aimée
Personne ou bien quelques
richesses mais malheur
À vous si vous tombez comble de
la terreur
Entre les dents ou les griffes du
grand Cerbère
Car il est sans pitié pour les
faibles marcheurs
Qui le réveillent qui comme des
amateurs
Espèrent qu'il ne soit que faux
mythe ou chimère
CHARON
Le nocher infernal sans fin passe et repasse
D'une rive à l'autre Sa fortune
est si grande
Qu'il pourrait déléguer sa tâche
La légende
Dit qu'il ne le peut car jusqu'à
ce qu'il trépasse
À ce travail aurait été par un
tenace
Dieu condamné Tous les morts par
une offrande
Symbolique devant pour aller vers
la lande
De la paix s'acquitter pièces ou
liasses
Tout est bon pour combler le
morose Charon
Lui qui semble enchaîné au cours
de l'Achéron
C'est un triste tableau qui se
présente à ceux
Qui arrivent jusqu'à lui fauchés
sans un rond
Car devront trouver à la sueur de
leur front
L'obole salvatrice et redevenir
pieux
LE CHEITAN
Moi qui ne rêvais que de revoir les houris
Et de les retrouver dans le
jardin de mon
Enfance j'ai été trompé par le
démon
Me voici en Enfer et le Cheitan
sourit
Du tour qu'il m'a joué Ma raison
dans les cris
Des damnés se perd je n'ai
d'autre solution
Que de le servir en priant la
rédemption
Divine Mon péché au morne pilori
M'a cloué mes pas se font lourds
sur ce chemin
Désolé qui nulle part ne mène Mes
mains
S'agitent dans le vent comme un
moulin perdu
Dans la tempête et dans la
tourmente Demain
Sera-t-il meilleur J'en doute Comme
un gamin
Le Cheitan m'a roulé et je suis
confondu
EL CHUPACABRA
Ô toi qui hantes les nuits de nombreux enfants
D'Amérique latine ô el Chupacabra
À ton maître mène-moi car je veux
mes bras
Lui offrir Comme toi j'aime le
goût du sang
Et je voudrais pouvoir combler
tous mes pressants
Et impérieux besoins sans braver
le frimas
Ou l'aride désert Planter mes
crocs au gras
Cœur du bétail ne me suffit plus
Je veux tant
Essayer l'humaine chair sans être
traqué
Par leur vengeresse meute que
contacter
Le prince des démons me semble
indispensable
Oui conduis-moi et tu seras
récompensé
Généreusement à l'aune de ta
bonté
Maléfique Oui guide mes pas vers
le Diable
LE CLOCHARD
[I]
Le clochard couché de tout son
long dans la chambre
Qu'il a louée pour le weekend se
demande
Comment il va faire pour regagner
l'Irlande
Sa terre natale Car le vent de
novembre
S'est levé et il craint de voir
ses beaux yeux d'ambre
Geler Après trois nuits passées
dans les méandres
De cette ville dont il ne sait
les légendes
Ni même le nom son esprit d'un
coup se cambre
Mais son corps mal nourri n'a
plus la force pour
Accomplir ses désirs Ce n'est
qu'au point du jour
Qu'il retrouva vigueur Il put
sortir du lit
Fouilla ses poches mais n'y
trouva nul secours
Après sa toilette il prit sa
veste en velours
Et retourna dans la rue l'air
déconfit
[II]
C'est sous le Pont Neuf que le
clochard me vendit
Son âme Je promis à cet esprit
perdu
Succès et richesse Quand je
voulus mon dû
Recouvrer il me fit le cauteleux
bandit
Une proposition me laissant
étourdi
Il me suggéra d'un chant puissant
éperdu
Composer en l'honneur d'un des
plus assidus
De tous les démons Il travailla
du mardi
Au lundi pour gagner sa liberté
En une
Semaine son poème était si
parfait qu'une
Larme perla même en mon cœur ce
qui n'arrive
Pourtant pas très souvent Donc
devant la tribune
Je le défendis et grande fut sa
fortune
Il put ainsi de son pays gagner
la rive
LE
CONDAMNÉ
Le condamné ferme les yeux Il sent le souffle
Froid familier de la mort dans son cou À chaque
Fois ce dernier se fait plus long plus démoniaque
Il connaît la douleur dans sa poitrine Il souffre
Ses jambes chancellent Il sent s'ouvrir le gouffre
Sous lui Sa tête tourne Il plonge dans un lac
Glacé et sulfureux Il a peur Ses dents claquent
Il crache du sang et son médecin s'essouffle
Lui aussi il transpire en augmentant ses doses
Car il sait que sauver un homme n'est point chose
Aisée et qu'il est plus simple parfois de lui
Écourter la vie Toujours est-il qu'il ose
Se servir de notre cobaye de ses narcoses
En le torturant en le plongeant dans la nuit
LE CRUCIFIÉ
Comme il nous a bien fait rire le crucifié
Quand on l'a descendu en slip de
sur sa croix
En lui faisant croire qu'il était
mort Le roi
Des Juifs tel qu'on l'avait
surnommé fut mené
Au tombeau Lorsqu'il en sorti
ressuscité
Il pensa vraiment qu'il était de
ce dieu froid
Le fils et il se mit à errer sur
d'étroits
Chemins d'Emmaüs à Damas comme un
jeté
Il réussit malgré tout à
entraîner à
Sa suite de nombreux fidèles
pleins de foi
Ce qui devait n'être qu'une
plaisanterie
S'est donc transformé en un
immense charroi
De croyances et de rites simples
et plats
Comme un jour sans vin ni joie
bref tartufferie
LE DÉBAUCHÉ
Dans la vie je n'ai qu'une obsession le sexe
De bars en bordels je traque mes
pauvres proies
Les saisis à la gorge et c'est
empli de joie
Que je les vois dans mes bras
succomber perplexes
Enduites d'huiles très précieuses
de latex
De boue ou d'excréments habillées
de soie
Ou de haillons je les traîne
comme des oies
À ma suite pour que mes
phantasmes complexes
Soient assouvis au plus vite et
sans nullement
Tarder Peut-être suis-je couché
maintenant
À tes côtés sans que tu te doutes
de rien
Penses-tu que je t'aime Oui à ma
façon sans
Concession morale Jamais la chair
ne ment
Toujours mes désirs sont tristes
et vénériens
LE DÉMON DE L'ÉCRITURE
Il est un démon bien plus puissant que tous les
Autres et il porte le nom de
l'écriture
Insidieusement il s’immisce dans
les
Méandres cérébraux des folles
créatures
Qui sans avoir la moindre idée de
ce à
Quoi elles s'exposent prennent un
grand plaisir
À remplir pages et carnets l'un
après l'autre
Mais il est un jour où son enfer
devient nôtre
Un enfer pavé de mots et de
lourds soupirs
Capables de ronger les intellects
les plus
Puissants et sincères de
phagocyter les
Cœurs purs et les âmes qui
s'abandonnent à
La main qui les guide sur le
chemin ardu
De la création Ô poète niais
LE DÉMON QUI M'HABITE
Le démon qui m'habite est bien le plus puissant
Qui soit Il me transmet à chaque
jour sa force
Et sa présence me protège C'est
l'amorce
D'un processus qui est né à
l'aube des temps
Lorsque tout n'était que chaos et
qu'en naissant
La lumière fit de l'ombre aux
ténèbres torses
En sécurité il se sait en moi
L'écorce
La carapace qui me fait
resplendissant
Qu'il m'a forgée est la plus
résistante armure
Qu'il ait été donné à un humain
impur
De posséder Son sang au mien
s'est mêlé
Pour que s'unissent nos âmes dans
un murmure
Léger et enivrant pour qu'un
néant obscur
S'abatte sur la Terre et son sort
est scellé
Les
démons et les pourceaux
Les démons sans corps se rabattirent sur les
Pourceaux après avoir été de celui du
Possédé chassés sur l'ordre du prétendu
Messie mais jamais ne se jetèrent dans les
Crocs de Neptune tel qu'il est conté dans les
Légendes du pauvre Luc qui avait perdu
La tête après avoir bu plus qu'il n'aurait dû
La vérité est que ces démons maigrelets
Restèrent bien au chaud dans leurs nouvelles soies
Et décimèrent des villes entières Sois
Remercié de tes crimes toi qui des Juifs
Te disais le roi et ton salaire reçois
Sur cette juste croix Ce que l'esprit perçoit
Et rapporte mal est rance comme le suif
LES ESCLAVES
Les esclaves m'ont de tout temps bien fait rire
Non pas que leur sort soit
particulièrement
Risible ou enviable mais bien
tout simplement
Parce que personne ne les pousse
à choisir
Ce genre d'existence et à vivre
en martyr
Social Les esclaves marchent au
pas vraiment
Et sont prêts à tout pour que
leurs tristes serments
D'allégeance ne soient rompus
aucunement
Tant pour eux que pour leurs
descendants Il faut les
Voir descendre depuis la nuit des
temps dans les
Entrailles de la Terre ou
nettoyer les cales
D'un paquebot durant des mois
Rêvant palais
Ou grosses voitures ils ont gobé
que c'est
En trimant qu'on pouvait
décrocher la timbale
L'EXORCISTE
Armé d'un crucifix d'un litre d'eau bénite
Et d'un beau sourire l'exorciste
entra dans
La chambre où reposait la
malheureuse enfant
Qui au grand dam de ses parents
était maudite
Habitée par un démon amalécite
Dont nul ne connaissait le nom En
regardant
Ses yeux il soupira détacha ses
sanglants
Poignets lui caressant sa mine
déconfite
C'est bientôt fini ma pauvre
petite amie
Lui susurra-t-il puis à brailler
il se mit
Quelques mots en latin et lui fit
un clin d’œil
Voilà il n'y a plus rien à
craindre l'ennemi
N'était pas méchant et de son
corps s'est enfui
Maintenant vous pouvez bien
ranger le cercueil
FAUST
Le docteur Faust voulait et conquérir le monde
Et tout savoir Il put séduire
Marguerite
Méphistophélès lui offrit la
terre ronde
En échange de son âme qui devint
vite
Sa favorite C'est lui qui le fit
descendre
Pour la première fois aux Enfers
Faust vit donc
Ce qu'avant lui aucun mortel
n'avait vu onc
Il revint et la belle Hélène se
fit prendre
Par son charme fou et sa docte
érudition
Il régna sur la Grèce et l'Europe
entière
Attendant son heure tapi sous un
faux nom
Il devait penser que pour tromper
le Démon
Cette ruse serait suffisante
Hélas non
Un beau jour Méphisto prit son
âme altière
LES
FEMELLES
La femelle humaine s'imagine qu'elle est
Une vénérable déesse et qu'elle doit
Être traitée ainsi Passée la bague au doigt
Elle deviendra pour celui qui au piège est
Pris un tourment si grand que c'est à son chevet
Seulement qu'il pourra récupérer son droit
Au repos Car c'est bien de sa vie qu'il devra
Payer le prix pour les quelques ébats surfaits
Qu'elle daignera lui accorder Un beau jour
Il la découvrira dans les bras d'un vautour
Et ce qu'il croyait de l'amour être en fiel
Se transformera Au matin de ses atours
Les plus fins ainsi que d'un sourire velours
Elle le narguera de ses yeux démentiels
LES
FILLES DE JOIE
Je me souviens de ces nuits passées entre vos
Bras aux bonheurs que nous partagions car c'est vrai
Que vous aimez toute la journée et je sais
Que vous n'oubliez nul de ceux qui de bravos
Ou de crachats couvrent vos corps si doux et beaux
Il arrive qu'une rose au jour qui paraît
Apparaisse comme par magie sous le dais
De vos tendres autels C'est comme un adagio
J'imagine qui les ténèbres percerait
D'un éclair enflammé On vous méprise vrai
Et pourtant il en est qui comme moi préfèrent
Cent fois jouir plutôt que se charger des frais
D'un quelconque mariage et ses tristes attraits
Oh oui filles de joie entrez en mon enfer
LES
FORNICATEURS
Sodome et Gomorrhe semblent ne pas avoir
Servi de leçon aux tristes fornicateurs
Ils ont claqué la porte aux bons prédicateurs
Qu'on leur envoyait tant de fois sans jamais voir
Ni reconnaître leurs erreurs de trajectoire
Leurs âmes reviennent donc pour leur grand malheur
À Satan le prince des ténèbres Leur heure
Est venue Ils auront beau prier nul espoir
Pour eux Les feux du ciel purifieront la
Terre et ne laisseront d'eux nulle trace La
Mort qui les attend ne sera qu'une bien maigre
Délivrance avant que de se plonger dans la
Géhenne éternelle Même les faux prélats
N'y échapperont pas Dieu sait qui est intègre
LES FOUS DE L'ÉCRITURE
On m'avait parlé d'eux à l'Université
Bien que sceptique je suis tout
de même allé
Vers eux juste pour voir et pour
les observer
Conclusion ils sont tous plus ou
moins dérangés
Tout comme on me l'avait prédit
Découragé
Par l'image triste par eux
véhiculée
De l'écriture et de la créativité
J'ai tout d'abord voulu tout
envoyer valser
Puis enfin je me suis dit qu'il
ne tenait qu'à
Moi de jouer ou non le jeu
jusqu'au bout à
Me mettre dans leur peau de
devenir aussi
Fou de l'écriture et d'errer
comme Kafka
Dans le vaste monde de passer
d'un tracas
À un autre raillé par celui qui
n'écrit
LE GARDIEN
Depuis la nuit des temps devant la seule porte
Que je connaisse entre ce monde
et celui des
Morts j'observe passer les âmes
qui vers les
Étoiles s'apprêtent à partir et
qu'emporte
Le vent froid des Limbes comme un
train de cloportes
Est-ce la fatigue ou l'ennui je
ne le sais
Qui me fait mépriser le cortège
de ces
Esprits perdus toujours est-il
que leur cohorte
Ne m'inspire que du dégoût Une
pitié
Affable toutefois peut vers une
amitié
Sincère conduire mais mon rôle
n'est pas
De tisser de tels liens Bien plus
de la moitié
Ne savent pas de quel côté ils
sont conviés
À passer Ainsi va la vie et le
trépas
LA GARGOUILLE
Une statue de pierre aux ailes immenses
Qui prennent vie quand la lune se
fait pleine
Et que la nuit la plus noire
s'est abattue
Sur la chaste campagne et la
ville et ses rues
Fornicatrices dans lesquelles
l'espérance
Du monde se perd dans le néant
absolu
Elle s'anime tout en bâillant et
clignant
Des yeux rougis par la poussière
et la haine
Pousse un cri et c'est d'un pas
assez résolu
Qu'elle se lance dans le vide en
sanglotant
Qui se souvient encor de ce à
quoi avant
Elle ressemblait La main du
Diable a ruiné
Pétrifié son esprit et son corps
décharné
C'est ainsi qu'elle se met en
chasse de sang
LE GÉNIE
Je suis un génie de ceux qui tapis au
Fond d'une bouteille transforment
et le monde
Et la pensée des gens Dans
l'âcreté immonde
D'un bouge infâme je vais frapper
au carreau
De ceux qui m'invoquent pour leur
porter joyaux
Et réconfort contre leur âme
moribonde
J'apparais quand sonne l'heure
nauséabonde
D'honorer le contrat Une fois que
le sceau
Est décacheté ils m'appartiennent
je fais
De ce qu'il reste d'eux ce que je
veux si vrai
Est mon pouvoir Il est alors bien
trop tard
Que pour se lamenter riche tu te
voulais
Ou célèbre tu l'es devenu donc je
t'ai
Inutile de fondre en larmes vil
bâtard
LE GOLEM
Le golem marche dans la rue Il ne voit pas
Ce qu'il y a
autour de lui il n'a qu'un but
Remplir la
mission que le rabbin hirsute
Qui lui a
insufflé la vie et qui ses pas
Guide lui a
confiée Il ne regarde pas
Les êtres qu'il
croise ni ceux qu'il exécute
De sang-froid à
coups de Kalach comme une brute
Ou plus
subtilement en causant le trépas
De nombreux
innocents en se transformant en
Bombe humaine Il
ne vit pas mais il est pourtant
Bien là face à
vous et il plonge ses yeux en
Votre âme avant
que de vous emporter Le temps
Passant les gens
se sont accoutumés à tant
De terreur
qu'ils en sont devenus fort absents
LE GRAND MASTURBATEUR
Derrière mon écran et toute la journée
Je mate les filles qui veulent bien leurs charmes
Dévoiler Voyant leurs corps
j'écrase une larme
Songeant à celle qui à moi
s'était donnée
Avec tant de ferveur et que j'ai
rejetée
Pour lui préférer ces nymphettes
dont les armes
Sont la plupart du temps factices
Leur vacarme
Sardanapalesque est autant qu'une
dyspnée
Sifflante dérangeant mais j'aime
à les entendre
Et serais prêt à mon âme très
chère vendre
Pour pouvoir ne fût-ce qu'un
instant les serrer
Tout contre moi Je suis perdu
dans les méandres
De la perversion et mon amour
n'est que cendres
Et pulvérulence sur ce chemin
soufré
LA GRANDE BELLEZZA
À Paolo Sorrentino
Nous tous qui cherchons la grande
beauté au cœur
De ce monde n'ayant ni sens ni
raison d'être
Devrions la chercher plutôt loin
derrière
Cet univers factice et sans nulle
saveur
En remontant jusqu'à la source du
bonheur
Qui fort confusément bruit avant
que de naître
Pour de vrai au jour de croiser
et reconnaître
Celle qui la fera jaillir avec
vigueur
Et constance pour le reste de
l'existence
Même si la vie nous sépare
l'instance
Qui gouverne la Terre est bien
cette rencontre
Éphémère avec l'Ange et la sœur
Circonstances
Imprévisibles ou alors
invraisemblance
Prédestinée nul ce sujet ne
démontre
GUANTÁNAMO
Ô Guantánamo je me souviens de tes murs
Et du sourire de tes geôliers
sadiques
Hurlant comme la mort Now you can suck my dick
Bon c'est vrai que j'ai fait
péter dans leur azur
Trois avions mais tout de même
être si dur
C'est vraiment pas sympa J'espère
qu'en Belgique
Ils feront quelque chose et que
pour ce tragique
Préjudice subi ils déposeront sur
Le bureau d'avocats renommés un
dossier
Et qu'ils m'accueilleront sans un
instant tarder
Pour que je puisse ainsi préparer
ma vengeance
En toute quiétude car je veux les
priver
Quel que soit le moyen de ma vie
volée
Je les déteste encor plus eux et
leur engeance
HAYEK
Hayek fait partie de mes démons préférés
Il est de ceux qui sont capables
de passer
D'un corps à l'autre sans jamais
être percés
À jour Il peut choisir son hôte
timoré
Et rester bien au chaud autant
que désiré
Ou en changer tous les jours Ses
jeux insensés
Laissent derrière eux des épaves
désossées
Il est facétieux le coquin
invétéré
Il vous fera faire les pires
choses sans
Que vous vous en rendiez compte
Son repoussant
Esprit s'attachera toutefois de
temps en
Temps à l'un ou à l'autre et de
resplendissants
Présents les comblera mais c'est
en gémissant
Que la plupart verront filer le
malfaisant
L'HÉRITIER
Je suis du trône de Russie l'héritier
Et ma grand-mère se nommait
Anastasie
Notre grand royaume de l'Europe à
l'Asie
S'étendait Nous aurions pu en
joie prospérer
Au lieu de cela je dois dans un
pigeonnier
Parisien survivre en menant d'un
gueux la vie
Comme un moujik ou un forcené
j'ai envie
De boire du matin au soir J'ai
espéré
Que je retrouverais tous ceux que
j'ai aimés
Mais aujourd'hui il me faut bien
me raisonner
Jamais la Russie ne voudra plus
de moi
Et les démons au corps
pulvérulent guidés
Par les doigts disgracieux du
diable empesé
Jetteront toujours sur nous
l'errance et l'effroi
LES HÉRITIERS
Il faut les voir autour du cercueil s'activer
Les héritiers en se
demandant à qui
Reviendra la maison
les meubles et le lit
Les couronnes
viennent à peine d'arriver
Que déjà le notaire
est là pour constater
Le décès et placer
les pancartes d'avis
De mise en vente Et
on lui offre un bon whisky
Tous voulant savoir
quand et semblant captivés
Dès que ce brave
homme un peu trop bien nourri
Ouvre la bouche Il
les écoute un peu aigri
Mais bon c'est son
boulot et puis ça fait partie
Du jeu se dit-il Ces
grands malades pétris
D'illusions ne sont
pas prêts de se voir guéris
Et ce n'est pas
l'argent qui leur rendra leur vie
L'ICONOCLASTE
Toutes vos idoles je viendrai les briser
Pour restaurer le seul visage
digne d'être
Glorifié Au cœur des temples se
dresse un être
Qui n'est en effet qu'un
usurpateur Lassé
De vos courbettes et de la fausse
bonté
Qu'ostensiblement vous aimez
laisser paraître
Que ce soit dans vos ris au
rebord des fenêtres
De votre bienveillante hypocrisie
j'irai
Mourir en martyr s'il le faut
pour rétablir
Le culte du seul vrai dieu digne
d'inscrire
Son nom au panthéon des peuples
et nations
Je raserai vitraux et transepts
pour bâtir
Un royaume idéal qui pourra
éblouir
Toujours le regard des jeunes
générations
L'INCUBE
Je ne m'éveille pas au point du jour mais bien
Lorsque la Lune se met à briller
donnant
À la nuit noire son aspect plus
qu'éclatant
Et lugubre Lorsqu'ils me voient
certains grands chiens
Se mettent à hurler Les pieux et
bons chrétiens
Ferment à double tour de leurs
filles dormant
Les chambres portes et fenêtres
calfeutrant
J'erre de-ci de-là cherchant un
corps qui mien
Pourrait devenir Mes proies sont
comme un linceul
Destiné à cueillir les fruits
d'un mûr tilleul
Mais ces précautions sont
absolument vaines
Car ma volonté et mes désirs sont
si forts
Qu'aucun mur ne pourrait leur
résister D'abord
Me repaître d'elles puis goûter à
leurs veines
LE JOUEUR
Des idiots je suis roi J'ai flambé en un jour
Ce que j'avais mis ma vie à
construire Après
Cela je suis rentré chez moi
comme un benêt
Et comme si de rien n'était j'ai
fait l'amour
Puis j'ai demandé à ma femme un
chèque pour
Les courses les traites de la
maison les frais
Du mois J'ai joué ce jeu
longtemps je l'admets
Suffisamment que pour nous
conduire aux faubourgs
De la misère Elle m'a quitté j'ai
voulu
Me faire soigner mais il m'a bien
fallu
Trois ans de thérapie et
plusieurs séjours en
Institution pour qu'enfin soit
résolu
Ce problème ayant pu conduire au
dévolu
Cercueil plus d'un joueur
ambitieux et fringant
LE JUGE
Une à une devant moi défilent les âmes
Celle-ci est un peu trop lourde
ou un peu trop
Noire et bien ce sera le feu et
les sanglots
Éternels Celle-ci est légère et
sans blâme
À son encontre alors elle évitera
flammes
Et douleurs et pourra pénétrer
sur le dos
D'un ange aux ailes de coton dans
le très beau
Pays du mérité repos Je juge
femmes
Comme hommes vieillards comme
enfants mais moi qui
Donc me jugera face à eux et mes
petits
Délits moraux semblant de prime
abord bien peu
Répréhensibles mais dont je
connais le prix
Bref je tremble aussi comme un
vulgaire bandit
De grand chemin face à la paix
d'un brave pieux
KALI
Je n'ai qu'un seul but sur cette terre détruire
Et détruire encore Telle est ma mission
Pour que l'équilibre soit maintenu Osons
La vénérer et se prosterner sans médire
Devant son visage plus noir que mon délire
Elle qui si l'on sait l'amadouer tison
Brûlant comme l'Enfer nous libère par don
Des pires démons qui ne veulent qu'en nous bruire
Ô Kali déesse de la mort et du temps
C'est bien dans tes bras nus que j'aimerais vraiment
Me reposer avant de pouvoir m'éveiller
À l'éternité Oui c'est toi qui me fais tant
Espérer durant la nuit et me guides dans
Les ténèbres denses cerclant mon oreiller
LILITH
Toi qui la première femme d'Adam était
Et de l'humanité donc ainsi la
vraie mère
Sache que je soutiens ta révolte
guerrière
Et ton soulèvement face à ce dieu
simplet
Qui voudrait que l'on se
prosterne en vrais niais
Pour le louer lui qui ne veut sa
face altière
Daigner nous montrer Sans doute
n'est-il pas fier
De sa plastique pour ainsi se
cacher laid
Comme un pou doit-il être et bien
piètre écrivain
Pour n'avoir depuis plus de cinq
mille ans rien
Publié Et ce ne sont pas les
mièvreries
Doucereuses de son fils souverain
hautain
D'un troupeau de moutons au
talent incertain
Qui me convertiront Vivent tes
diableries
LOUANGE à ma LANGUE
De toutes les langues le français est la plus
Noble car elle seule est capable
de nous
Faire vibrer au son du bel
alexandrin
Cette musique qui coule presque sans
fin
Au plus profond de nos mémoires
Qu'il est fou
Celui qui méprise cette langue
absolue
Qui seule peut faire frémir nos
souvenirs
Le français est bien le langage
des dieux
Qu'ils soient de l'Olympe ou
d'ailleurs qu'ils aient leur nom
Gravé dans les sphères d'or ou
sur les menhirs
C'est bien lui qui résonne au
jour de nos adieux
Pour nous accueillir au royaume
du sang bleu
Qui nous attend après la barque
de Charon
Dans les éternelles plaines du
grand renom
LUCIFER ENCHAÎNÉ
Les fers qui rongent tes poignets et tes chevilles
Ô grand Lucifer toi qui portes la
Lumière
T'ont réduit à une vie
valétudinaire
Et souffreteuse toi qui étais
l'escarbille
Qui allait embraser ce dieu de
pacotille
Et son céleste empire ainsi que
la rivière
Pure et cristalline qui allaite
la fière
Sion de son sang chaud Oui toi
que l'on houspille
Pour des peccadilles l'on devrait
bien plutôt
Te louer et sur le trône te
placer ô
Toi grand Ange déchu qui nous
libérerais
De l'hypocrisie des tristes
angelots
Se prosternant devant la face de
ce gros
Démiurge imbu de sa personne et
contrefait
LES
MÂLES
Les mâles humains ne songent qu'à une chose
Insérer leur pénis entre les cuisses d'une
Quelconque femelle et assouvir l'infortune
De leurs désirs charnels Si les bouquets de roses
Et les parfums ne sont que des moyens moroses
Nécessaires pour eux pour séduire une brune
Ou bien une blonde comment les quelques runes
Qui se cachent dans ce texte pourtant grandiose
Pourraient-elles prendre sens et leur apporter
Un peu de réconfort Leur imbécillité
Et leur obsession de la chose emporteront
Leurs âmes dans un noir torrent plein d'âcreté
Mais tout cela est loin bien sûr de m'affecter
Puisque je récolte leurs corps dans mes chaudrons
LE
MIROIR
Je suis le miroir de vos âmes je reflète
Tous vos maux et tourments vos plus grandes terreurs
Aussi Vos défauts je surligne et vos erreurs
Grave sur votre front Le prince des poètes
Même n'échappe à mes traits D'une gentillette
Tape dans l'œil je lui rappelle son songeur
Front trop grand son nez trop large ou son déshonneur
Profond Il se peut qu'il me saisisse et me jette
De rage contre un mur mais c'est tout déconfit
Qu'il se rend compte que les morceaux qui défient
Sa personne sont à présent plusieurs dizaines
Il les rassemble entre ses pauvres doigts bouffis
Tente de les cacher mais son plus grand défi
Sera d'effacer leurs railleries malsaines
LE MISANTHROPE
Je n'ai jamais aimé la compagnie des hommes
Leur instinct grégaire et leurs
coutumes sociales
Me fatiguent au plus haut point
Suis-je spécial
Ou si différent d'eux Non sans
doute mais comme
Je pense l'être tout m'est donc
permis en somme
Je méprise la foule et crache
déloyal
Dans toutes les soupes comme un
simple et banal
Pithécanthrope De compliments
économe
Mais de quolibets de toute sorte
je suis
Plutôt généreux et dans ma
noirceur je fuis
Mon vide intérieur et ma trop
grande torpeur
Ont fait de moi quelqu'un qui se
repaît d'ennui
Et de dénégations en tout genre
Aujourd'hui
Tellement seul je me suis perdu
et j'ai peur
MOLLY MALONE
Où donc es-tu douce Molly Malone qui dans
Les rues de Dublin vendais des
coquillages
Dans une charrette pour unique
étalage
À tous tu souriais de bon cœur et
tes dents
D'albâtre affriandaient nombre de
jeunes gens
Entraînant même les nobles dans
ton sillage
Es-tu cette ombre que la fièvre
anthropophage
Emporta une nuit noire Vas-tu
errant
Dans les venelles de la ville
sombre comme
L'espèrent en chantant de
nombreux gentilshommes
Riches comme pauvres derrière toi
tu
As rassemblé et tu as réussi par
là
Ce que bien des puissants ne
purent faire La
Lumière c'est toi et tes seins
dévêtus
LA MOMIE
À Rose-Marie François
Elle me scrute Je la regarde Lequel
De nous deux est-il le plus surpris Elle qui
Dort depuis quinze mille ans dans son
sarcophage
Ou moi qui ai l'étrange impression de l'avoir
Si bien connue Ses cheveux et son visage
Me rappellent quelqu'un dormant en ma mémoire
Au plus profond de mes souvenirs Était-elle
Reine pour avoir droit d'être des nécrophages
Ainsi préservée ou était-ce une catin
Qui du cœur d'un riche nigaud s'était saisie
Sans doute jamais ne le saurai-je tout comme
Jamais son âme ne saura rien de l'homme
Que je suis Et pourtant entre nous un lien
Plus fort que la mort s'est tissé et affermi
LE MONSTRE
De tous les monstres qui ont peuplé cette terre
Je suis de loin le
plus grand Même le terrible
Satan se courbe sur
mon passage Impassible
Comme Salomon je
donne mes délétères
Sentences envers
tous ceux qui hier osèrent
Me défier ou sans
raison intelligible
Selon mon bon
vouloir Gare à toi si ma cible
Tu es car nul de mes
rets ne peut se défaire
Hommes femmes
enfants assouvissent mes jeux
Et subissent nombre
de tortures Les feux
Qui s'emparent d'eux
sont si ardents et brûlants
Que personne ne peut
penser que les pieux
Leur traversant le
corps et le cœur souffreteux
Ne soient que le
début de leurs tristes tourments
LA MORT
La mort est un rideau noir qui tombe sur nos
Yeux
paraît-il Croire que tout s'arrête quel
Drame
Je me refuse à penser comme ça
Dussé-je
m'attirer les foudres des dieux
Les
moqueries et rires de tous les gueux
Qui
peuplent la terre bénie et éternelle
Qui
accueillit en son sein nombre de héros
Parmi
les plus grands Ô infâme cancrelat
Qui
t'imagine qu'elle est plate ou bien ronde
Simplement
parce que des gens t'ont martelé
Ainsi
l'esprit sans voir un peu plus loin que l'onde
De
ton miroir ou des murs et des barbelés
Je
t'intime donc dès à présent de changer
Ta
façon de songer et freiner ta faconde
LA MOUJIK
La moujik a compris comment tournait le monde
À dix-sept ans elle a donc écarté
les cuisses
La voilà maintenant bien établie
en Suisse
Pour avoir été la maîtresse et la
seconde
Épouse d'un fermier un peu niais
La blonde
Hérita de tout sans que la
famille puisse
Faire quoi que ce soit Oui le
démon s'immisce
Même dans les endroits les plus
reculés gronde
Et montre les dents pour gagner
des paysans
Les âmes La moujik fut retrouvée
dans
Une mare de sang les veines
lacérées
Car ce que le Diable donne
toujours reprend
Et la mort n'est que le début du
châtiment
Décidément il sait choisir ses
préférées
LE MOULIN DU DIABLE
Il tourne et il tourne le moulin du Diable
Son grain est si pur et sa farine si douce
Que le pain qui en sort est comme jeune pousse
Printanière au sortir de l'hiver chérissable
Comme un feu de bois dans la nuit impénétrable
Mais qui donc l'a construit un soir de lune rousse
Au détour de cette clairière de mousse
Tout près de ce ruisseau à l'eau si délectable
Certains disent que c'est le pauvre Jean aidé
D'une chèvre aux poils d'or d'autres que c'est André
Au pied bot avec son âne ailé qui s'y sont
Attelés Comment ont-ils fait pour soulever
Ces pierres si lourdes Aucun n'en a idée
Mais vers le Démon se portent tous les soupçons
LA MUSIQUE
La musique qui fait battre si fort nos cœurs
Qu'elle soit des sphères célestes ou d'ailleurs
Nous enivre et nous fait vivre des expériences
À nulle autre pareille Elle est une science
Qui élève aussi bien nos âmes que nos corps
Les transportant comme par magie vers des
Terres mystérieuses toutes pavées d'or
Et des pierres les plus précieuses Son chant
est
Un appel éternel traversant et les temps
Et les âges aussi pur que le diamant
Ou le cristal c'est un souffle qui fait danser
Les pauvres comme les riches et s'abaisser
Toutes les entraves au bonheur qui naissant
Au plus profond de nous nous empêchent d'aimer
NOSTALGIE
Te souviens-tu de nos tendres années passées
Au cœur du jardin de notre enfance de ces
Hauts arbres aux feuilles vertes à cette paix
Que nous partagions jusqu'à cette journée
Funeste où nous avons au fruit honni goûté
Ce même fruit auquel nous devons le procès
Que nous firent anges et démons Oui tu sais
Pourtant comme moi que nous fûmes mal tentés
Par Satan et qu'à lui seul incombait la faute
Sans défenseurs aucun nous dûmes quitter l'hôte
Qui nous avait donné la vie et son royaume
Indifférent il nous chassa loin de ses côtes
Et nous abandonna sur cette terre haute
Au sein de laquelle nous écorchons nos paumes
NOWHERE BOY
Je ne viens de nulle part je n'existe pas
Aussi incroyable
cela puisse paraître
Les mots qui
traversent vos bouches sont mes maîtres
Je suis aussi léger
que le vent et mes pas
Sont si silencieux
que c'est sur du taffetas
Que l'on dirait
qu'ils se posent De vos ancêtres
Je suis la voix et
je me joue de vos êtres
Comme un enfant le
fait d'une poupée de soie
Je ne vous veux pas
du bien car vous êtes les
Descendants du péché
immonde et le plus laid
De tous car vous
servez de réceptacle pour
Les ennemis de mon
ami Hadad Palais
Ou forteresses ne
vous de l'esprit follet
Que je suis
défendront au jour de Yom Kippour
LA NYMPHOMANE
La nymphomane en ce jour m'a rendu visite
Comme d'habitude elle avait le
feu aux fesses
Et comme à chaque fois elle me
fit promesse
Et propositions pour le moins
explicites
Elle me fatigue un peu la pauvre
petite
Car en papillonnant de la sorte
elle blesse
Son triste cœur et son âme mais
par tendresse
Je cède à sa folie à sa langue
bénite
Et à ses soupirs de femelle qui
n'a plus
Dormi depuis trois nuits Une
épave absolue
Voilà ce que ses sens dissolus
ont fait d'elle
Et ce n'est pas l'aurore au
soleil fort goulu
Qui va arranger les choses Déjà
l'afflux
De sang lui colore les joues et
les mamelles
ONLY
LOVERS LEFT ALIVE
Ta langue dans ma bouche et ton corps dans mon corps
Voilà le seul chemin vers notre éternité
Oui nous nous sommes bien juré fidélité
Et jamais ne viendra nous enlever la mort
Car ce lien qui unit nos âmes est si fort
Que même sa faux ne pourrait le disloquer
Mais malheur à nous si nous devions abdiquer
Et rompre nos serments car ce serait alors
Dans les tristes Limbes que nos esprits damnés
Devraient pour un temps très long rester cantonnés
Je me demande tout de même s'il est bien
Sage de ne pas nous soumettre à l'obstiné
Fatum qui impose aux humains leur destinée
Mais cette question n'est que pour les stoïciens
ORPHÉE et EURYDICE
Eurydice gisait blanche comme la mort
Là tel un fruit amer trop tôt
tombé de l'arbre
Orphée l'aimait et la statue de
marbre
Qu'elle était devenue lui arracha
alors
Des larmes de diamant Mais il le
savait fort
Bien qu'il ne fallait se
retourner l'idolâtre
Poète et encor moins croiser ses
yeux d'albâtre
Tu l'as perdue pour toujours
triste remord
Qui t'accompagnera dans tes
chants jusques à
La fin des temps Oui tu peux bien
pleurer ô toi
Qui fus incapable de suivre
l'injonction
Des dieux en te pensant supérieur
à ces rois
Qui gouvernent chacun de nos pas
dont les lois
Ont été fermement prouvées sans
discussion
LE PACTE
Le contrat était là De mon sang je n'avais
Plus qu'à signer Sa face était
radieuse et
Moqueuse mais je n'en remarquai
rien Aisée
Fut la vie à partir de cet
instant Navets
Et rutabagas par des poules et
civets
Furent remplacés J'ai aussi pu
épouser
La plus belle fille du village
Toisé
Par tous jusques alors un matin
au chevet
Du roi fus appelé Il était sans
enfants
Et me légua tout son royaume
Triomphant
Je devins donc un des plus
puissants suzerains
Du continent à mon approche
l'olifant
Lançant dans la plaine son chant
ébouriffant
Le Malin dans tout ça Parti tel
un marin
PAN
Pan des satyres est le dieu Il est donc mon
Dieu Ah que j'aime avec lui partir à la chasse
Aux jeunes mâles ou femelles car c'est grâce
À son syrinx qu'il peut les charmer Les démons
Comme les anges ne peuvent à ce doux son
Résister se laissant emporter dans de grasses
Orgies mélangeant flammes et plumes lasses
Pour donner naissance à d'infâmes nourrissons
Oui Pan tu es bien mon seul et unique dieu
Et je n'aspire qu'à tes côtés vivre vieux
Pour pouvoir conquérir et capturer toujours
Plus de proies dans mes rets Pour certains l'odieux
Et très répugnant Pan est le symbole affreux
De la déperdition morale À qui le tour
LE PÉDOPHILE
La main qui caresse les cheveux des enfants
Semble si douce sage et aux yeux
des parents
Vraiment innocente Lui ses yeux
transparents
Se mettent à briller d'un éclat
triomphant
Ses bras tremblent quand il sait
que d'un étouffant
Baiser il va pouvoir se saisir
d'un vibrant
Corps innocent et pur Son péché
est si grand
Et le vice si bien enraciné qu'il
fend
Son esprit condamnant son âme à
une errance
Sans fin Mais au nom de quelle
bienséance
Finalement pourrions-nous juger
sa déviance
Puisque tout cela n'est que de
toute évidence
Convention sociale Pourquoi la
véhémence
Populaire aveugle face à son
inconscience
LE PENDU
La langue pendante le pendu se balance
À la branche qui le supporte Ses
yeux grands
Ouverts semblent scruter le doux
soleil couchant
Qui donne à la vallée une belle
apparence
Pensez-vous que la nuit qui
doucement s'avance
Va le libérer de ses souffrances
Chantant
Le Diable s'approche et le
détache prenant
Grand soin à récolter sa dernière
semence
Quelques incantations dans une
langue étrange
Et voilà le pendu remis sur pieds
phalanges
Dressées et acérées prêt à le
servir pour
L'éternité Voici pourtant que
passe un ange
Qui reste insensible à ses mielleuses
louanges
Tu as péché et tu erreras pour
toujours
LA PÉRI
La péri m'attendait à l'ombre d'un chemin
Pour m'emmener dit-elle au pays
de mes rêves
Celui-là même qui m'échappe dans
la brève
Accalmie de la nuit Au sein des
parchemins
J'avais eu vent d'elle mais
respirer sa main
Évanescente fut pour moi comme le
glaive
Qui tranche la tête de l'esclave
qui lève
Les bras en suppliant qu'on
l'achève demain
Pour ne plus souffrir les
brimades de son maître
Elle m'entraîna dans la vallée de
salpêtre
Et me fit subir les pires des
traitements
Elle devint pourtant ange et
c'est au pied d'un hêtre
Que je me réveillai en sursaut
Oui renaître
Est bien le préféré de tous mes
sentiments
LE POÈTE
Le poète puise son inspiration
Dans les excréments et la fange
qui l'entourent
Tant qu'il le peut il va droit au
but sans détours
Faisant bien fi de toute
convention
Il n'est point de ceux qui
enrobent leurs idées
Dans des drapés flottants ou
d'autres faux-fuyants
Comme la pensée se perd dans un
roman
Elle se fortifie au contact
décidé
De quelques vers rimés ou non
laissant surgir
La source éternelle de toute
vérité
Le Verbe à l'état pur le seul des
élixirs
Qui puisse guérir une âme
Frivolités
Pour certains axiomes pour
d'autres que donc dire
Nul ne pourra jamais le poète cerner
LE POIVROT
Il est huit heures du matin et le bistrot
Va bientôt ouvrir ses portes Et
je trépigne
Comme Bacchus lorsqu'il est trop
loin de sa vigne
Oui c'est vrai je suis un
véritable poivrot
Mes enfants regardent mes yeux
sans dire un mot
Quand ils m'agacent un peu trop
je leur assigne
Quelques taloches pour pouvoir me
sentir digne
Avant de me noyer dans mon whisky
Les flots
De bière ont fait de mon estomac
une éponge
Je ne parle même pas de tout ce
qui ronge
Mon foie et mon âme qui ne
décolle plus
Du zinc et du bingo Dans les
tourments je plonge
Sans cesse et mes nuits sont
habitées de songes
Cauchemardesques C'est le néant
absolu
LA POMME
J'étais là au jardin d'Éden quand Adam et
Ève croquèrent la pomme Oh oui
j'étais là
Mais contrairement aux racontars
ce n'est pas
Moi le très grand Satan qui les y
ai poussés
Non ces deux-là se sont eux-mêmes
révoltés
Contre leur créateur Ils ont armé
leurs bras
Leur langue et leur esprit à la
fois contre moi
Et contre lui Nous ne purent que
les chasser
Mais depuis lors sur la surface
de la Terre
Ils ne font rien d'autre que de
chants délétères
Nous accabler nous qui leur avons
tout donné
Ils ont inventé la science et ses
mystères
Pour nous dénigrer et bien pire
Ils déblatèrent
Mais ne nous atteindra point leur
stupidité
LES PORTES
Les portes personne ne sait si Dieu les a
Créées pour qu'elles soient
fermées ouvertes
Entrebâillées Leurs gonds
tournent en grinçant
Ou dans le plus grand des
silences sans que nul
N'ait soupçon de ce qui derrière
l'attend
Tout comme ne savait pas le
guerrier Saül
Ce qui l'attendait sur la route
de Damas
Il va de même pour notre mémoire
Certes
Certains souvenirs sont flous
d'autres plus présents
On se demande qui de Faust ou de
Satan
Les fait claquer À moins que ce
ne soit le vent
Qui seul en s'engouffrant dans
les couloirs du temps
Les fasse résonner ou tristes ou
riants
Les portes ne sont que des
gardiennes d'instants
LES
POSSÉDÉS
Ils hurlent dans la nuit noire les possédés
Ils errent le ventre vide et nul aliment
Ne peut les rassasier Leur vil égarement
Est si grand qu'ils ne sont même pas excédés
Par leur sort Après des mois ces dégingandés
Pantins s'effondrent et ils nous font vivement
Penser aux épaves qui jonchent sombrement
Certains lacs asséchés Nous aimerions aider
Bien souvent ces pauvres égarés mais il nous
Est interdit de le faire car le courroux
Des dieux les poursuit Les plus chanceux d'entre eux
Aboutiront dans de tristes maisons de fous
Mais la plupart seront dévorés par le flou
Esprit qui bassement a pris possession d'eux
LES
PRÉDATEURS
Les prédateurs rôdent que ce soit au fond des
Bars ou aux abords des écoles Leurs proies sont
Si naïves qu'elles pensent leurs intentions
Nobles ou louables Quand elles sous leur dais
Succombent il est bien trop tard Le farfadet
A accompli son œuvre assouvi ses pulsions
Et disparaît aussi vite qu'un simple son
Résonnant de paroi en paroi au fond des
Grottes Sois heureuse ô victime s'il te laisse
La vie sauve et si tu peux revoir l'épaisse
Couche de brouillard qui enveloppe la ville
Dans laquelle tu as grandi dont la déesse
Tu fus un jour au moins avant qu'il ne paraisse
L'être le plus odieux qui soit et le plus vil
LA PRINCESSE TRISTE
Élisabeth dansait Les regards se portaient
Vers elle et sa grâce naturelle
Son cœur
Pourtant se serrait à chaque pas
ses humeurs
Lunatiques prenant le dessus Elle
était
Depuis son enfance la plus tendre
en effet
Atteinte par moments de profondes
langueurs
Sans que nul ne puisse y remédier
Les docteurs
Avaient affirmé que le mariage
serait
Pour elle bénéfique et
réconfortant qu'un
Mari doux et aimant chasserait
les embruns
De sa mélancolie Il n'en fut rien
et les
Praticiens ne purent que s'en
apitoyer
Quelques larmes coulent Elle
semble foudroyée
Blêmit et s'effondre tout en
criant La paix
LE RACISTE
Je ne supporte ni les bronzés ni les noirs
Et encore moins les jaunes Mes
héros sont
Le général Lee et les fils de la
nation
Qui ont sacrifié leur vie au
laminoir
Viêt-Cong un conflit que je ne
veux savoir
Perdu par le pays de ma
vénération
Je cache dans le vent les
abominations
Commises en son nom et rêve de
revoir
Fleurir les croix de feu dans
tout l'Alabama
Je ne voterai pas c'est sûr pour
Obama
En oubliant que mes aïeux
continentaux
N'étaient que le rebut de la
terre des rois
Des âmes errantes condamnées au
froid
Éternel et à la pitance des
pourceaux
RASPOUTINE
Je me souviens du jour où Raspoutine vint
Me trouver Le marché que je lui
proposai
Était assez honnête et c'est sans
rechigner
Qu'il signa sans avoir bu ni
vodka ni vin
Nous pouvons l'assurer Son âme
nous revient
Donc et ses châtiments tiendront
l'éternité
Et son esprit et son triste corps
décharné
Nous serviront dans les Ténèbres
qui sans fin
Se repaîtront de son infamie et
de son
Ignominie Le débauché comme l'on
L'appelait alors si il l'avait
voulu tsar
Il serait devenu mais c'est par
ses pulsions
Qu'il se laissa guider et sa
génération
Entière plongea dans les gorges
du Tartare
LA REINE DES NEIGES
La reine des neiges vêtue de son blanc
Manteau m'invita un jour à dans
son traîneau
Prendre place J'étais jeune et
comme un agneau
Je l'ai suivie pour un voyage
troublant
Dans son monde froid et glacé
comme un étang
Durant l'hiver Lorsque je
l'avouai penaud
À mon maître celui-ci me donna
l'anneau
Qui serre mon cœur car il savait
qu'il est grand
Le pouvoir de celui qui reçoit
cet insigne
Privilège Elle me montra un très
beau cygne
Et me dit que c'était mon animal
totem
Je bénéficie depuis lors de sa
digne
Protection et chaque rencontre
est un doux signe
Même si j'entends à présent un
requiem
LE ROCHER DU DIABLE
Tombé du ciel voici plus de quinze mille ans
Le rocher du Diable a déversé sur
la Terre
Tous les maux des pires maladies
à la guerre
Fratricide ainsi que les
tourments les plus grands
Ils ont eu beau prier tous les
moines géants
Qui protégeaient bêtes et humains
rien à faire
Son pouvoir était trop grand Dans
la soufrière
J'ai pu plonger et mes
incantations au flanc
De la verte colline ont apporté
leurs fruits
Jusques aux oreilles de Satan
Avec bruit
Elles arrivèrent et c'est à lui
que je dois
La puissance qui est mienne
aujourd'hui La nuit
Fut longue au cœur de ce
minuscule réduit
Mais j'ai maintenant le monde au
bout de mes doigts
LA
ROUTE
La route est de loin la préférée de mes
Compagnes car elle m'offre des aventures
Inoubliables À pied ou bien en voiture
Que ce soit en novembre ou bien au mois de mai
La route m'est toujours fidèle de Bombay
À San Francisco sans parler des préfectures
Dont nul ne connaît le nom Mes pas sont impurs
Et la souillent comme de tristes quolibets
Mais la route leur rend leur voile virginal
Que l'on croise un riche ou un pauvre original
Ce sont autant d'êtres qui resteront gravés
Dans notre mémoire et seront notre fanal
Au jour d'affronter la noire nuit bestiale
Qui nous emportera avec les dépravés
LE SAGE
Le sage donnait ce soir une conférence
Comme à son habitude il reçut les
honneurs
Du public qui chanta sa joie et
son immense
Plaisir en l'acclamant Face à
tant de clameurs
Comme il était heureux le sage de
voir tous
Ces gens presque en transe et qui
se mettaient debout
Pour lui que les filles ne
regardaient pas à
L'école et que les profs
trouvaient assez commun
En somme Oh oui quelle revanche
pour lui Un
Grand homme voilà ce qu'il était
devenu
De ceux que la foule saluait bien
bas
Pourtant il savait que tout était
convenu
Et qu'il rentrerait seul vraiment
seul ce soir-là
Il pleura lorsque sa mansarde il
regagna
LA SALAMANDRE
La salamandre qui orne mon omoplate
Est le symbole de l'immortalité
qui
Réside au cœur du feu sacré de
tout ce qui
A vécu un jour et par là vivra
toujours
Comme le Phénix qui peut renaître
de ses
Cendres elle a dans son sang
froid et écarlate
Quelque chose qui lui permet de
voir le jour
Au plus profond de la nuit en
revenant des
Ténèbres sombres et denses comme
un brouillard
De printemps Je la vois parfois
danser dans un
Rêve ou l'autre en n'étant pas
sûr que c'en est un
Oh oui maintenant qu'il se fait
pour le moins tard
Que le grand rideau noir commence
à se baisser
Devant mes yeux gris je ne veux
que l'embrasser
SATAN
Ô grand Satan toi qui es depuis si longtemps
Le tyran absolu de ce monde
triste et vide
De sens où règnent en maîtres
démons avides
Rieurs et cyniques te réjouis-tu
quand
Les justes et les bons glissent
et tombent dans
Tes pièges et filets quand leur
âme candide
Plonge dans ton royaume et te
sert toi fétide
Ange déchu chassé des cieux parce
que dents
Et griffes tu avais osé montrer
au Dieu
Qui nous gouverne tous Bien sûr
que tu ris vieux
Grigou puisque tes serfs
glorifient ton nom
Et entretiennent ton empire toi
l'envieux
D'entre les envieux qui fais
rougir les yeux
De tous ceux qui t'aiment ne
sachant dire non
LE SATANISTE
Un pentacle de sang se cache sous son lit
Il porte sur lui des
vêtements de cuir noir
Et s'est fait
tatouer le chiffre laminoir
De toute espérance
Il attend seul que minuit
Sonne avant de
sortir égarer dans la nuit
Son âme en priant
que Satan dans un manoir
Des faubourgs enfin
lui parle du purgatoire
Et de la mission qui
l'attend loin de l'ennui
Qui l'assaille au
cœur des églises le dimanche
Quand il peut
observer le prêtre qui se penche
Sur ces écritures
soi-disant saintes et
Vénérables alors
qu'il sait que l'avalanche
Des mots qui
composent ces livres onc n'étanchent
Sa soif de liberté
Il s'endort épuisé
LE SCRIBE
J'ai vu le scribe sur les berges du Nil qui
Me souriait Quel jour étions-nous
et en quelle
Année en quel siècle Oh tenez-le
vous pour dit
Je me trouvais bien en un autre
temporel
Espace Il me montra ses signes et
je les
Compris Ses yeux de cristal
avaient charmé
Mon âme et je ne pris pas peur
quand défilèrent
Devant moi les noms et les
visages de tous
Les démons et de tous les dieux
qui peuplèrent
Cette Terre Mais il n'en manquait
qu'un le mien
Ce sont les cris de mon guide qui
de ce fou
Voyage sortirent mon esprit Un
chien
Sur la route après un chétif âne
aboyait
C'est donc ainsi que mon nom m'a
été ôté
LA
SENTINELLE
La sentinelle assise au rebord de ce monde
Se mit à trembler de tout son long et lança
Le cri qu'elle pensait ne jamais avoir à
Lancer Lentement comme un nuage qui gronde
Derrière l'horizon sa face rubiconde
Immobile depuis toujours se mit d'effroi
À se tortiller mais personne n'écouta
Ou n'entendit sa voix C'est ainsi que l'immonde
Satan put s'installer dans son nouveau royaume
Il devint très vite souverain et des psaumes
À sa gloire furent par de nombreux poètes
Composés Que devint la sentinelle Un gnome
Affreux prétend qu'elle fut couverte d'un baume
Magique l'empêchant de pleurer sa défaite
LE SERPENT
Tout qui boira à mon venin n'en sortira
Pas indemne Il n'est nul antidote
connu
Pourtant tous se pressent à mes
pieds tels des rats
Et je vous promets que je ne les
force pas
La puissance que je leur accorde
est de bien
Courte durée une heure un an
toute une vie
Parfois pour les chanceux mais au
jour de gagner
L'abîme insondable ils se mettent
à pleurer
Comme des enfants en voyant
qu'ils ont perdu
Leur âme qui sera à jamais dans
leur corps
Prisonnière et captive et que
leurs or et biens
Ne leur seront d'aucun secours
que ce soit lors
Du passage ou du grand jugement
Leurs envies
Et leurs désirs seront leur
tourment infini
LES SINGES SAVANTS
Les singes savants se trouvent partout sur Terre
Et ils m'insupportent au plus
haut point depuis
Longtemps La rage aux dents je
les regarde nuit
Et jour abreuver nos archives
délétères
L'étant suffisamment déjà de mots
austères
De thèses de notions et de
concepts d'ennui
Profond et dont le but est de
combler le puits
De leur ignorance par des gravats
sectaires
Apprendre est si noble mais
imposer et faire
Ânonner sans comprendre aux
enfants de l'enfer
Est punissable car ceux-ci ne
sont en rien
Responsables des torts et des
errements des
Générations qui les ont précédés
Des
Apophtegmes fleuris n'espère nul
soutien
LE SODOMITE
Toi qui vivais dans le péché et la luxure
Sans aucunement t'en repentir tu
payas
Ton effronterie de ta vie Il se
fraya
En effet un chemin jusqu'à toi le
feu pur
De la dévastation et dans la nuit
obscure
De ton évanescence il rit et
s'empara
Des âmes des tiens Aux autres il
pardonna
Car ils s'étaient soumis devant
ses écritures
Prosternés face à sa puissance et
ses éclairs
Sulfureux Pourquoi donc
laissa-t-il le doux air
Qui maintient vivant gonflant
torse et poumons
M'abreuver moi qui de tous était
de la chair
Le plus assoiffé J'ai pu
reprendre la mer
Pour le rapporter à tous mes amis
démons
Sonnet à William
Ô William si pour toi la vie est un enfer
Fracas étourdissant ne signifiant
rien
C'est là le destin de l'ensemble
des humains
Que de ne pouvoir se libérer de
leurs fers
Tu le sais pourtant très bien
mais comment défaire
Ce que le destin a tissé au clair
matin
De notre naissance et incrusté en
nos mains
Nul ne le peut et il faut
accepter l'amère
Fatalité que les Parques nous ont
tressée
Nous ne pouvons comme toi que
nous résigner
Au sort du long fil d'or qui nous
maintient vivants
Comme des acteurs nous n'avons
droit de changer
Le moindre mot ou geste et devons
respecter
Scrupuleusement le scénario du
vent
LES STEPPES
ROUGES
À Isabelle Bielecki
Les
eaux de l'Amour de la Neva comme celles
D'autres
fleuves sont bel et bien d'un rouge sang
Père
regarde pour la dernière fois en
Pleurant
la terre de ses ancêtres Dieu qu'elle
Va
lui manquer là-bas au loin dans la patrie
Qui
voudra bien de lui dans laquelle sa vie
Il
finira L'exil est sans doute la pire
Des
condamnations pour un homme Il respire
À
grandes bouffées l'air si particulier
Ne
se rencontrant qu'au sein des steppes et plaines
Russes
porté par un souffle régulier
Balayant
tout sur son passage sans pitié
Pour
les cœurs qui comme le mien ont tant peine
À
continuer de battre FATALITÉ
LE SUCCUBE
À chaque fois que je ferme les yeux le soir
Je rêve qu'il vienne le succube à
la peau
Si douce et fripée sorti de son
caveau
Oui c'est vrai j'ai été séduit
par ses yeux noirs
N'inspirant aux autres que peur
et désespoir
Lorsque s'unissent nos bouches
loin du tombeau
Dans lequel il passe ses jours
mon doux cerveau
Entre en ébullition et mes sens
sans espoir
Se déchaînent et me poussent vers
des excès
Immoraux Au petit jour mes
cheveux défaits
Et mes quelques cernes trahissent
la nuit folle
Passée entre ses bras Je veux le
retenir
Mais le démon femelle esquisse un
beau sourire
Semblant soudain penser Adieu
pauvre fol
LE TÉMOIN
J'ai vu des femmes et des enfants mutilés
Des civils innocents spoliés ou bombardés
Par des généraux sans scrupules
tout bardés
De décorations et d'étoiles au
fêlé
Cerveau des hommes sans joie trop
bien muselés
Par les rets tendus de la bonne
société
J'ai vu la machine chaque jour
plus gagner
De terrain j'ai vu des valeureux
internés
Ou emprisonnés pour le seul crime
d'avoir
Dit la vérité ou d'avoir osé
vouloir
Défendre un sans-papiers ou
brûler un portrait
J'ai vu que le démon qui buvait
notre espoir
Riait aux éclats de sa trop belle
victoire
Oui j'ai vu tout cela mais je n'ai
rien fait
TON ANGE
Je suis ton ange je te regarde au travers
De
tes yeux et de tes actes Au-dessus de
Ton
épaule que ce soit la gauche ou la droite
Je
notifie tout Rien ne peut m'échapper
Je
m'exprime non pas en prose mais en vers
C'est
moi qui appose mon sceau avant le rude
Passage
devant le grand juge Ton front moite
Ne
peut que te trahir avant que d'être happé
Par
le grand tunnel de l'éternité ou du
Néant
Que ton ventre ait été maigre ou dodu
Que
remplies ou bien vides aient été tes
Poches
c'est moi et moi seul qui ferai que tu
Tombes
d'un côté ou de l'autre Oui-da tu
Peux
gémir mais partout avec toi m'emportais
MA TOUR
À chaque jour passant j'ai construit patiemment
Pierre après pierre la tour
hideuse et immense
Dans laquelle je me suis
retranché je pense
Depuis le moment de ma naissance
ciment
De ma mélancolie et de mes grands
tourments
Oui je songe au bonheur mien là
où tout commence
De ce si beau jardin celui de
notre enfance
Dans lequel d'innocents jeux
deviennent serments
Pieux au jour de le quitter et de
rejoindre
Le monde des hommes Cette tour
est le moindre
De mes maux mais aussi refuge le
plus sûr
Pour ma volage âme voulant voir
le jour poindre
Au cœur des ténèbres et se faire
d'huile oindre
Pour échapper aux cris damnés et
leurs blessures
LA
TRAÎNÉE
La traînée est en chasse et elle se balade
Dans les rues de la ville de bar en bar
À la recherche d'un mâle pour le brouillard
Confus de ses pulsions dissiper La malade
Vient de te repérer Ses grands yeux de dorade
Se sont allumés et tu sais que tu vas par
Son lit sans problèmes passer Mais à l'instar
D'un Faust vaporeux il faudra que tu t'évades
De ses bras amoureux au petit matin pour
Échapper aux fureurs qui sans aucun secours
Ne manqueraient pas de te détruire si tu
Restais La traînée est en effet comme un sourd
Collectionneur d'âmes qui tiendrait dans ses gourds
Doigts toutes celles qui périssent sans vertu
Le Trille du Diable
Un jour le Diable aux yeux de braise est apparu
À Tartini Il lui a joué un tel
trille
Si fougueux que jamais oublier il
ne put
Le pauvre homme passa ainsi toute
sa vie
À la recherche des notes qu'il
entendit
Oh il en coucha des milliers sur
le papier
Aucune n'atteignant ce qui
l'abasourdit
Au cœur de cette nuit trop courte
et sans pitié
Ses sonates et ses compositions
connurent
Pourtant un beau succès auprès du
grand public
Après chaque concert toutefois le
critique
Créateur en larmes fondait Face à
un mur
Ses proches se trouvaient
Était-il excentrique
Ou alors émotif Folie lunatique
YAHVÉ
Yahvé est un petit démon sans importance
Le plus avide et le plus avare
que l'on
Puisse rencontrer Ses doigts sont
si fins et longs
Qu'il peut se saisir de sa
médiocre pitance
Des âmes égarées dans le désert
immense
En toute quiétude S'il cache son
oblong
Visage c'est parce qu'il est si
laideron
Que tout qui le voit en meurt
d'effroi La sentence
Est sans appel Si vous tentez de
vous enfuir
Il vous pourchassera comme l'amer
Zéphyr
Poursuivant l'aurore durant la
sombre nuit
Yahvé la fin de ton règne se fait
sentir
Et je te vois trembler Ta face de
tapir
Reposera bientôt au plus profond
d'un puits
CONCLUSION
LE DERNIER MOT DU DIABLE
Je suis le Diable le plus habile démon
Que l'on puisse croiser dans ce
monde La Terre
Entière est sous mon joug Malheur
à toi très chère
Âme qui me croise car je te veux
dans mon
Enfer pour assouvir mes désirs
Mes sermons
Sont scandés dans tous les
temples de l'Univers
Et ma parole se répand comme des
vers
Sur un cadavre La haine dans tes
poumons
J'attiserai et d'un seul souffle
gagnerai
Ton cœur Contre moi tu ne peux
rien résister
Est inutile et ne te fera gagner
qu'un
Peu plus de souffrances
Laisse-toi donc sombrer
En mes bras et laisse mes doigts
ta volonté
Guider pour qu'avec moi tu ne
fasses plus qu'un